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  • Photo du rédacteurCharles MARTY

Les navires autonomes, rupture stratégique sur les mers

Depuis les années 2000, les drones se sont progressivement imposés au cœur de la conduite d’opérations militaires et ont transformé la doctrine d’engagement sur le terrain, mais également l’économie des armées. Captant jusqu’à aujourd’hui l’espace aérien, les véhicules de combat sans pilote trouvent désormais des applications navales qui pourraient révolutionner l’environnement économique, stratégique et opérationnel des marines du globe.


 

Le 9 juin dernier, la Chine annonçait le succès des premiers essais en mer et sans équipage de son premier navire de surface autonome (en anglais USV : Unmanned Surface Vehicle), actuellement sans désignation officielle, dans la province du Zhejiang. La conception de ce « drone naval » furtif, conçu par la société chinoise Beikun Intelligent Technology (BIT) et mesurant moins de 40 mètres de long pour un déplacement de 200 tonnes, a commencé en 2015 sous l’impulsion de BIT et du Président de la République populaire de Chine, Xi Jinping. L’USV participe en effet à la redéfinition de la Chine comme un « grand acteur maritime », et à l’ambition de Pékin de devenir la première puissance mondiale, notamment sur le plan militaire.


Ce navire autonome chinois répond directement au développement par les États-Unis d’engins similaires, notamment l’USV « Sea Hunter », lancé par la DARPA (l’Agence de recherche et développement du Département de la défense) et l’ONR (le Bureau de recherche naval de l’US Navy) en 2016, et son navire-jumeau le prototype « Sea Hawk ». Le développement par ces deux grandes puissances de systèmes maritimes dronisés répond à une application à la mer des paradigmes observés avec l’expansion de l’usage des drones sur des théâtres de guerre terrestres et aériens.

Cette technologie duale (technologie civile, mais comportant des possibilités d'application militaire) peut avoir des retombées potentiellement révolutionnaires dans la sphère de la défense ; elle doit par conséquent être étudiée sous le même angle que celui de l’intrusion des drones aériens dans les logiques opérationnelles, économiques et géopolitiques des puissances y recourant.



Le concept du drone militaire appliqué à la marine


Les drones de combat aériens (en anglais UCAV : Unmanned Combat Air Vehicle) font aujourd’hui partie du paysage « normal » des opérations militaires. Les premiers aéronefs pilotés à distance avaient été développés au cours de la Seconde guerre mondiale par les États-Unis, pour compenser leurs pertes importantes d’avions de chasse. Mais c’est à partir des années 1970 qu’un usage tactique s’est affirmé, notamment dans le cadre de la guerre du Kippour de 1973 au cours de laquelle Israël a déployé ses premiers modèles de drones de reconnaissance Mastiff, et de la guerre Iran-Irak de 1980 qui a vu l’Iran recourir à des drones Mojaher de facture locale dans les dernières années du conflit.

L’avènement des guerres du 21e siècle a vu une explosion du recours aux UCAV en appui direct aux unités combattantes, en particulier à travers l’usage intensif de drones par les forces américaines à partir de 2001 en Afghanistan, en Irak et en Syrie.


Au-delà de leur emploi dans la lutte anti-terroriste, deux conflits récents illustrent particulièrement l’usage massif de drones dans le cadre d’un conflit de haute intensité : la deuxième guerre du Haut-Karabagh de 2020, où les drones turcs et israéliens opérés par les forces de l’Azerbaïdjan ont saturé les défenses anti-aériennes de l’Arménie et ont donné à Bakou une vision intégrale du champ de bataille. Et l’invasion de l’Ukraine par la Russie débutée en février 2022, dans le cadre de laquelle les unités ukrainienne ont recouru à des drones de fabrication locale et turque pour ralentir l’avancée des forces russes, accomplir des missions de guérilla et exécuter des frappes de précision sur des installations et des cibles russes.

A l’heure actuelle, les armées du monde ont recours au drone pour un large éventail d’opérations, allant de la reconnaissance, la surveillance et l’écoute électronique, au soutien et l’appui aérien et aux frappes à longue distance. Les modèles les plus réduits, en particulier les « drones suicides » ou munitions vagabondes, sont même utilisés pour des frappes directes à usage unique.

Le développement de navires de surface autonomes répond à une logique similaire : réduire le risque de pertes humaines et augmenter de manière économique le volume des moyens pouvant être engagés dans une opération. La demande est particulièrement forte en Asie Pacifique, du fait de la hausse constante des dépenses militaires de la Chine et de l’Inde depuis les années 2000, et des tensions récurrentes entre Pékin et la plupart de ses voisins en mer de Chine méridionale.

Les États-Unis avaient initialement conçu leur USV « Sea Hunter » dans le cadre du programme ACTUV (Anti-submarine warfare Continuous Trail Unmanned Vessel), mais le navire abouti devrait pouvoir se consacrer à davantage de tâches que la seule lutte anti-sous-marine. Washington prévoit ainsi que ses navires sans équipage puissent remplir un important panel de missions : le renseignement, la surveillance, l’acquisition de cible et la reconnaissance (ISTAR) ; le déminage ; la sécurité maritime ; la guerre électronique ; la lutte anti-sous-marine ; le soutien aux opérations d’interception maritime ; et la lutte anti-incendie. Il est probable que la Chine, et d’autres puissances travaillant à l’élaboration de navires autonomes telles que la Russie, mais aussi Singapour, la Grande-Bretagne et Israël, destinent leurs systèmes au même ensemble de missions.

Le marché des USV a originellement été développé dans le cadre d’une utilisation civile, principalement dans le cadre du transport de fret maritime, d’exploration des fonds marins, d’observations scientifiques – océanographie, hydrographie, etc. – ou encore de tourisme. Le concept des navires sans équipage représente ainsi une forme de révolution dans le développement d’équipements destinés aux armées, puisqu’il s’agit originellement d’une technologie civile adaptée à un usage militaire – là où jusqu’à présent, des innovations étaient, dans leur immense majorité, initialement développées dans le cadre militaire, avant d’être dérivées pour trouver des applications civiles.

Il s’agit donc d’une vraie « technologie duale » : les perspectives d’amélioration des capacités opérationnelles, mais également d’accroissement du volume des flottes, sont si prometteuses que les armées cherchent désormais à transformer leur organisation en se basant sur cette technologie.



Une rupture économique, industrielle et stratégique sur le long terme


La demande croissante de moyens dans les marines pour réaliser des missions de plus en plus diversifiées se heurte inévitablement à la réalité industrielle des armateurs et des chantiers navals, limités par leur capacité de production, mais aussi la réalité économique d'États qui ne peuvent soutenir qu’une flotte à l’effectif cadré par leurs budgets. Il s’agit du même dilemme qui entoure le dimensionnement des armées de l’air, dont les coûts d’acquisition, de mise en œuvre et de maintien en condition opérationnelle pour leurs appareils croissent depuis plusieurs décennies de manière exponentielle.

Les USV apparaissent alors comme une solution économique permettant de fournir un volume important aux flottes nationales : les grands modèles actuellement développés par la Chine et les États-Unis, d’un très faible déplacement d’eau pour leur taille (200 tonnes pour le nouveau drone naval chinois contre 3600 tonnes pour une frégate Lafayette), auraient également un coût de mise en œuvre très faible.

La DARPA annonce en effet pour son « Sea Hunter » un coût de fonctionnement journalier entre 15.000 et 20.000 dollars. A titre de comparaison, d’après l’ancien directeur de programmes du Tactical Technology Office de la DARPA Scott Littlefield, un destroyer de classe Arleigh Burke a un coût de mise en œuvre de 700.000 dollars par jours. S. Littlefield ajoutait que la plus grande charge utile – du fait du gain de place réalisé par la suppression des installations à usage humain telles que les cuisines ou les cabines – et la plus grande endurance et autonomie ainsi obtenue rendaient le navire sans équipage particulièrement avantageux.

Cette conclusion est rejointe par l’Amiral Robert Girrier, le directeur des systèmes d’armes autonomes de l’US Navy, pour qui les USV représentent un atout, « à une fraction du coût d’un bâtiment habité ».


Le coût à l’achat estimé – 20 millions de dollars – et les frais de mise en œuvre font ainsi de ces modèles lourds de navires autonomes une option extrêmement compétitive, particulièrement pour les nations moyennes ne disposant que d’une poignée de bâtiments de surface pour leur défense maritime.

Mais au-delà des immenses USV chinois et américains, devant être capables de rivaliser avec des bâtiments tels que des corvettes ou des frégates en termes de capacité multi-missions, et potentiellement en termes de puissance de feu, un large segment de marché est également ouvert à des modèles plus réduits. Ainsi, plusieurs pays, dont la Turquie, se sont attachés au développement d’ « USV parasites », c’est-à-dire un drone maritime de petite taille pouvant être déployé depuis un bâtiment plus large : le drone ULAQ turc dévoilé en 2020 et actuellement en phase de tests mesure ainsi 11 mètres, et ses multiples version devraient remplir des missions de renseignement, surveillance et reconnaissance, mais aussi de protection et d’escorte ou encore de lutte de surface.

Il s’agit d’un format et d’un rôle opérationnel similaire à ceux du « Common USV », développé par l’américain Textron Systems, qui serait possiblement déjà mis en œuvre au cœur d’un conflit en tant qu’unité de reconnaissance et de renseignement pour les forces ukrainiennes contre la Russie.


Le développement par la Turquie et États-Unis, mais également par la Chine et la Russie, de petits modèles de drones navals, mesurant parfois moins de 3 mètres de long, indique que ces puissances entendent automatiser l’ensemble du spectre militaire des missions réalisés par leurs marines. De la même manière que les projets d’aéronefs de future génération incluent déjà l’autonomisation optionnelle de leurs systèmes, ces pays entendent diminuer les coûts opérationnels de leurs flottes grâce aux USV.

Ce changement industriel induit donc bien un changement doctrinal clair : d'une part, les chantiers navals « traditionnels » voient une partie de leur charge allégée par l'intrusion de nouveaux groupes dédiés à l'armature de drones navals dont les plus imposants ne mesurent « que » 40 mètres de long ; d'autre part, les grandes puissances maritimes considèrent que les navires autonomes sont plus aptes à permettre à leurs marines de conserver une masse critique que les navires de guerre dotés d'un équipage.



Un potentiel aggravement des tensions géopolitiques actuelles


L’un des principaux enjeux liés à l’adoption de drones navals et de navires autonomes est celui des tensions croissantes entre les États-Unis et la Chine, en particulier dans le cadre de Taïwan : en effet, depuis les années 2000, la Chine est devenue le premier chantier naval au monde, ayant mis à l’eau trois porte-avions en dix ans, et faisant entrer en service chaque année 3 fois plus de navires que les États-Unis. Pékin dispose aujourd’hui de 355 bâtiments militaires, ce qui en fait la première puissance maritime mondiale.

Les États-Unis comptaient jusqu’à présent compenser leur déficience en vaisseaux de ligne par l’usage croissants de navires sans équipage dédiés tels que le « Sea Hunter », ou d’anciens bâtiments civils reconvertis en USV. La démonstration des prouesses en haute mer de navires autonomes chinois, signal clair que la Chine souhaite également investir ce terrain, accentue la course aux armements entre Washington et Pékin, et diminue les capacités américaines à contenir la Chine en Asie-Pacifique.

De plus, si l’irruption des drones aériens a joué un rôle accélérateur dans la plupart des conflits où ils ont été employés, nous devons également envisager l’accroissement des tensions globales qu’entraînera une dissémination de USV dans les marines du globe, alors que le combat naval fait un retour discret dans les stratégies des grandes puissances. En effet, le rôle joué par les UCAV dans la victoire de l’Azerbaïdjan contre l’Arménie en 2020 est indéniable, et il serait difficile d’affirmer que le conflit aurait éclaté sans l’avantage décisif que ces drones promettaient aux azéris.

Surtout, si l’usage d’un drone dans le cadre d’une opération de surveillance ou de reconnaissance peut aisément être considéré comme un acte hostile, la destruction d’un drone par une autre puissance abaisse sensiblement le seuil de la conflictualité entre des adversaires potentiels. Ainsi, les tensions entre l’Iran et les Etats-Unis avaient sensiblement augmenté, à la limite de la déclaration de guerre, en juin 2019, lorsque l’Iran avait annoncé la destruction d’un drone de surveillance MQ-4C Triton de l’US Navy qui survolait le détroit d’Ormuz – l’espace aérien international pour Washington, l’espace aérien iranien pour Téhéran.


L’extension au domaine marin de l’usage de masse des drones contribue ainsi à affaisser le « matelas sécuritaire » mondial : non seulement il deviendra plus probable que des pays possédant un volume important de navires autonomes et de drones maritimes soient tentés d’entrer en guerre avec un voisin en étant dépourvu, mais le risque d’incidents pouvant déclencher des conflits ouverts est également accru de manière exponentielle du fait de l’ouverture au théâtre maritime de cette option à bas coût économique et humain.

Mais de plus, l’usage croissant de l’Intelligence Artificielle (IA) dans le cadre de l’autonomisation des systèmes de drones aériens, navals et à terme terrestres doit être pris en compte : la plupart des drones sont encore pleinement contrôlés à distance par des opérateurs humains. Toutefois, de plus en plus de modèles d’UCAV n’ont qu’un guidage limité, étant dotés de systèmes autopilotes, où ont des systèmes de vol pleinement autonomes et n’ont plus besoin de l’intervention de l’homme. A long-terme, les drones militaires devraient même pouvoir se coordonner et être pilotés à travers un cloud de combat ; c'est particulièrement vrai pour la composante aérienne, où les futurs UCAV voleront en essaims.

Plus les tâches et missions à accomplir par un drone sont nombreuses et complexes, plus celui-ci sera soutenu par l’IA, sa puissance de calcul permettant une conduite simultanée de plusieurs rôles exploitant chaque fonction du drone à son plein potentiel. C’est notamment le cas des USV testés par la Chine et les États-Unis, du fait de leur taille. L’IA est d’ailleurs un des principaux facteurs de la chute du coût de fonctionnement d’un UCAV ou d’un USV : pas de salaire à verser, pas d'équipage qui aurait besoin de se nourrir ou de dormir, etc.


Cependant, l’imposition de l’IA militaire couplée à des systèmes de drones entraîne des risques majeurs quant à la montée des conflits et la résolution de crises : la Rand Corporation, think tank américain, a publié en 2020 un rapport sur la dissuasion et l’usage de la force à l’ère de l’IA. La conclusion est sans appel : des systèmes automatisés sont inférieurs pour assurer une dissuasion par rapport à une prise de décision humaine ; l’emploi de drones soutenus par l’IA accentue le risque d’escalade, voulue ou subie, et de déstabilisation d’une crise ; et ces systèmes seront moins capables d’entraîner ou entreprendre des actions de détente.

La Rand estime ainsi, à travers ce rapport, qu’en cas d’emploi de drones par un ou plusieurs belligérants, ceux-ci seraient plus prompts à détruire les drones de l’adversaire, ce qui entraîne le risque de riposte et d’escalade.


La dynamique d'implémentation d'IA et de cloud de combat censés soutenir les capacités conventionnelles des armées doit donc être tempérée par un constat simple : le recours massif au drone, sur les mers ou dans les airs, peut améliorer l'efficacité au combat au niveau tactique et stratégique, mais il peut être préjudiciable à long-terme pour la conduite d'une politique de désescalade ou de maintien et de consolidation de la paix.



Conclusion


Avec l’importance croissante prise par les systèmes d’armes létaux autonomes dans les armées, il est inévitable que les tensions s’accroîtront entre les grandes puissances qui commencent à autonomiser leurs marines. Si des points de contention précis, tels que Taïwan, faisaient déjà apparaître le risque d’un conflit ouvert entre la Chine et les États-Unis d’ici 2027, l’accélération des programmes de dotation d’UCAV et d’USV risque de contribuer à l’instabilité de ces points de tensions, et de rapprocher l’échéance.


La Chine, en particulier, a pris particulièrement à cœur la production et le recours à des drones au ratio coût/rendement extrêmement positif : selon une note de l’IRSEM de mai 2022, les drones chinois seraient très fiables, mais surtout 8 à 10 fois moins onéreux que leurs équivalents américains. L’Armée Populaire de Libération, en particulier sa branche navale, ne voit pas les drones comme des auxiliaires à leurs forces régulières, contrairement à l’US Navy, mais comme une composante combattante essentielle venant compenser certaines de ses vulnérabilités.

Il s’agit d’une priorité pour la Chine, du fait de l’immensité de la zone Indopacifique dans laquelle Pékin envisage d’opérer, mais également de par son intention de recourir à des forces asymétriques face à la supériorité américaine dans le domaine des porte-avions, des sous-marins nucléaires ou des satellites. Ainsi, de nombreuses sociétés chinoises telles que BIT ou Yunzhou Tech concentrent leurs efforts dans la création d’USV pouvant déployer et travailler en tandem avec des UCAV.

Les États-Unis, encore à l’heure actuelle en avance grâce à leur programme « Ghost Fleet Overlord » d’expérimentation de flotte autonome, font face à un risque de blocage au niveau institutionnel, du fait du manque de cohérence entre le militaire et le politique quant à la modernisation de leurs flottes : la Chambre des Représentants du Congrès a ainsi rejeté en juin 2022 la demande de l’US Navy de retirer du service 5 navires pour débloquer des crédits censés moderniser la marine. Le rythme actuel de production et de mise en service de bâtiments de ligne par les chantiers navals américains laissent peu de doute quant au choix futur de compenser la faiblesse de leur arsenal par des USV dédiés.

Il est intéressant de noter que la France, à travers Naval Group, pourrait ne pas se saisir du segment des grands USV, mais s’intéresse plutôt à celui des sous-marins autonomes (en anglais UUV : Unmanned Unverwater Vehicle). Ainsi, en octobre 2021, Naval Group a dévoilé un prototype de drone sous-marin océanique mesurant 10 mètres de long, sur lequel il travaille en secret et sur fonds propres depuis 2015.

Cet engin, qui doit entrer en service avant 2026 si ses tests sont concluants, serait un multiplicateur de forces pour l’ensemble des armées françaises : il permettrait d’accroître fortement les capacités opérationnelles d’autres unités grâce à son activité de renseignement et de soutenir la mission de permanence à la mer de la Marine nationale.


Bien que la France ne soit pas seule sur le marché des UUV – les États-Unis développant le drone sous-marin ORCA, le Royaume-Uni le drone Manta, et la Chine mettant déjà en œuvre son HSU-001 – il pourrait s’agir d’un « game-changer » venant concurrencer la suprématie annoncée des flottes de navires de surface autonomes. Mais surtout, l’état d’avancement considérable du prototype de Naval Group pourrait également consacrer la place de l’Hexagone dans le secteur des drones de haute technologie.

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